26/11/2021
FO CH Beauvais
Lettre ouverte remise à Madame Brigitte Bourguigon, Ministre déléguée chargée de l’autonomie des personnes âgées.
Le vendredi 26 Novembre 2021
Madame la Ministre,
Nous ne sommes ni surpris, ni étonnés de votre visite au Centre Hospitalier Simone Veil de Beauvais au regard de la période pré-électorale à venir. En effet, bon nombre de vos prédécesseurs nous ont fait l’honneur de leur présence sans oublier bien évidemment les effets d’annonces qui les accompagnent. Depuis 2003, fameuse année de la canicule qui a emporté beaucoup de nos ainés, le plan Grand Age avait été annoncé à grand renfort de médiatisation par nos dirigeants. Le vieillissement de la population française et l’augmentation de l’espérance de vie semblaient enfin devenir un axe prioritaire en faveur de nos anciens.
Mais force est de constater qu’à ce jour, aucune mesure phare n’a été mise en place, ni par les différents gouvernements qui se sont succédés ni d’ailleurs par le vôtre !
Le seul bénéfice que les agents hospitaliers de Beauvais n’ont eu de ce plan, est l’amputation d’une journée de repos (journée locale «fête Jeanne Hachette ») transformée en journée de solidarité, que nous traduisons par « travailler plus pour gagner moins ».
Madame la Ministre, en effet, le constat est amer. Les années passent et se ressemblent. Pourtant l’annonce était alléchante. Les soignants que nous sommes attendent bien plus que des mots. Ils veulent des actes !
Où est passé le « un soignant pour un patient/résident » ? Où sont les moyens financiers annoncés pour pallier au manque de personnel ? A quand l’arrêt du recours à du personnel peu qualifié, sous payé (agent de vie sociale, ASHQ…) ne bénéficiant ni de la NBI, ni de la prime Grand Age, et qui pourtant se dévoue corps et âme pour suppléer voire remplacer leurs collègues aides-soignants quand ceux-ci sont en sous-nombre ?
Madame la Ministre, nos collègues en EHPAD ont besoin de moyens, ils ont besoin de bras, ils ont besoin d’une réelle reconnaissance qui passe par la stabilité financière, statutaire et institutionnelle et par la prise en compte de la singularité du métier qui est le leur, à l’instar de leur homologue qui sont en poste sur des secteurs jugés plus honorifiques par les médias (urgences, réanimation, SAMU).
Ce manque de moyens se traduit au quotidien dans notre établissement par des choix drastiques.
Tous les matins, le soignant en EHPAD se pose la même question : qui bénéficiera en premier de ma présence pour une vraie toilette ou n’aura qu’une TMC (Tête Main Cul) comme on dit vulgairement dans notre métier ?
Avez-vous conscience, Madame la Ministre, que deux personnels ont à effectuer en moyenne 24 toilettes- habillages- sorties du lit des patients/résidents, sachant qu’une toilette dure environ 20 mn, qu’elles soient réalisées seules ou à deux, selon la pathologie et/ou par nécessité ? Un petit calcul rapide nous mène à 8 heures de prise en charge totale, 8 heures exclusivement dédiées à cette tâche !
Certains vous diront, Madame la Ministre, et nous l’entendons régulièrement : « oui mais vous n’habillez pas tous les patients, ils sont autonomes » sauf que cela n’est plus tout à fait le cas et qu’il n’est pas rare que l’ensemble ne puisse être effectué que bien après le repas du midi ! Ces actes ne nous amènent-ils pas à instaurer une maltraitance institutionnelle ? Quid du bien-être psychique de nos anciens, là où nous devrions prendre le temps de parler, rassurer, accompagner, écouter… toutes ces petites attentions trop souvent oubliées et qui ont retrouvées toute leur importance en cette période de pandémie.
Madame la ministre, accepteriez-vous que l’on prenne en charge vos proches ou vous-même de cette façon ? N’oublions pas que nous sommes tous les futurs résidents potentiels de nos établissements sachant que nous n’aurons pas tous la chance de pouvoir bénéficier de soins dans un EHPAD de luxe ou d’être maintenu à domicile avec du personnel soignant.
« Une société se juge à la manière dont elle traite ses personnes âgées » Ambroise CROIZAT. Ne devrait –il pas en être de même de ces soignants ?
Veuillez agréer, Madame la Ministre, l’expression de ma très haute considération.
Le Secrétaire Général FO CH Beauvais,
Monsieur David COTU